Black Friday
Black Friday, vendredi noir
Jour maudit, désespoir.
L’obscurité s’abat
Sur le Golgotha.
Mais nous sommes de la religion
Des consuméristes compulsifs
Optimistes excessifs,
Nous achetons et achetons.
Comme des Américains
C’est bien le moins.
Et surtout moins cher.
On n’en a pas besoin si on est sincère,
Mais à ce prix-là, c’est quand même une affaire.
Le vendredi tout est permis :
C’est que du bonheur, la planète se réjouit
À ce qu’on dit :
Le CO² gonfle, la famine sévit,
Les incendies ravagent
Les espaces civilisés ou sauvages,
La mer monte, le corail meurt
(On s’en fout, on n’est pas acheteur),
Bien gérée, la pandémie
Nous laisse l’atonie,
Des guerres lointaines ou proches tuent…
Chez nous l’administration s’évertue
Lentement à disparaître
Derrière les robots nos maîtres.
Les services publics deviennent rentables
Quand ils sont passés sous la table.
L’argent est partout, virtuel,
Invisible, inépuisable, perpétuel.
Pendant ce temps, ce noir vendredi
Nous achetons à crédit
(Y en aura pas pour tout le monde,
Et moi et moi et moi !)
Crédit sur la fin du mois
Crédit sur l’utilité profonde
Crédit sur la pollution et la santé
Crédit sur la qualité…
Le vendredi est noir
Au sortir des dépotoirs,
Pardon, des dépôts-ventes
Ou des dépôts qui mentent.
Et que faire de ces achats ?
Je donne ma langue au chat !