Il y a 50 ans, le 21 janvier, naissait Philippe Siou. Disparu en 2013, le prof de lettres nous a laissé une centaine de chansons, qu’il chantait dans les bars et les boîtes de Lille. Leur énormité faisait rire parfois ou laissait pantois les auditeurs qui n’en croyaient pas leurs oreilles. Mais à les lire on ressent le spleen qui sous-tend toute son œuvre, l’ailleurs du poète au milieu du désert des hommes, qu’il évoque dans une langue savante, mêlée de vieux français, d’argot, de régionalismes et de néologismes savoureux.
Philippe mon fils, tu nous manques.
Ses chansons ont été rassemblées dans un livre : La pipe à l’envers chez Edilivre.
LES VACANCES
Voilà fermées les scoles, et adieu l’institutrice
L’humanité se bronze au feu du Dieu qui brûle
La maîtresse bikine sur les plages d’Ibize
Madame a bien maigri et elle s’en congratule.
Ils ont acquis ticket pour un bateau qui cingle
Ou désiré souper dedans le gros Boeing.
Déjougués ils s’ébattent en sandales au tarmac
En leur pupille tangue un rêve de hamac.
D’aucun vont en Asie, et son frère à la pêche.
Mais il faut aller loin, au loin que l’autre ignore.
La sandalette hardie foulera Marrakech,
Madame fut roulée des vagues du Bosphore.
De mon banc je les mire se ravir à l’exote
Et je songe en fumant à mon petit voyage
Croisière verticale, sur mon banc, sous la flotte.
Plus seul qu’un mort d’hier et son canard sauvage.
Ils reviendront hélas, pleine pogne d’images,
Le campeur héroïque et le touriste sage,
Me parler de la lune et du dresseur d’iguane,
C’est qu’ils ont vu Le Caire. J’écrase ma gitane.
Parfois un avion tombe, c’est Dieu qui rend justice.