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Brest

Image terreur 1

Terreur à Brest, Jean-Nicolas Trouille et la Révolution

Le 16/01/2023

        J'évoque dans ce livre la vie quotidienne à Brest de 1789 à la Restauration. Je retrace les grands évènements auxquels les Brestois et leurs élus ont participé : la chute du roi, la bataille de Kerguidu, l'éviction des Girondins, le combat naval de Prairial, etc. L'installation du Tribunal révolutionnaire et de la guillotine à Brest ajoute l'horreur des exécutions arbitraires à la situation désastreuse de la ville : disette, émeutes, mutineries, chômage, épidémies, rébellions des campagnes, blocus anglais...

     Jean-Nicolas Trouille, ingénieur des bâtiments civils de la marine, vénérable de la loge des Elus de Sully, commandant de la garde nationale de Brest, député de la ville au Conseil des 500 puis directeur des Travaux maritimes, est un acteur important dans l'épopée révolutionnaire brestoise.   

Freminville couverture

Les aventures du chevalier de Fréminville

Le 06/08/2022

Les aventures du chevalier de Fréminville, marin savant et travesti

Pour ceux qui n’auraient pas encore lu le livre en voici un extrait :

« Notre capitaine décide de rallier Cherbourg. Mais la route est longue et on ne peut porter que les basses voiles. Il fait presque nuit quand nous arrivons dans l’ouest de Cherbourg. Il faut embouquer la passe de Querqueville sans trop s’approcher de la côte.

Je suis sur le point de me coucher, épuisé, quand la cloche appelle tout le monde sur le pont. Je me précipite sur l’échelle pour gagner la batterie et de là le panneau de l’arrière quand, dans un coup de roulis terrible, la frégate se couche sur tribord. Les boulets sortent de leurs parcs et roulent avec fracas sur le pont. Je suis sur l’échelle. Elle sort de ses taquets et me frappe violemment sur les côtes. Je me raccroche de justesse au surbau du panneau au-dessus de ma tête. Ainsi pendu dans le vide, une douleur intense me déchire la poitrine. Un canonnier m’a vu. Il me tire par les bras de ma situation critique. Le navire s’est enfin redressé. Je me traîne sur le tillac en crachant du sang.

Dans une demi-obscurité, la tempête mène une bacchanale ahurissante. Des murs d’eau noire sillonnés d’écume sale, menacent de s’effondrer sur nous. Le vent arrache littéralement le sommet des vagues et nous arrose en permanence d’une douche glacée. Les nuages noirs sont frangés de lueurs de sang et la lune apparaît par instant, phare blafard jetant son linceul sur le navire et la mer. L’idée de la mort m’assaille et bizarrement, je n’ai pas peur. La douleur qui se manifeste à chaque mouvement que je fais, à chaque choc que le navire m’inflige, me signifie que je suis encore vivant. Je ne vais pas mourir. Je m’accroche à un canon pour ne pas être emporté par les masses d’eau qui balayent le pont.

Le vent nous pousse à la côte, il faut virer de bord, remettre de la toile. Le grand hunier déferlé, se déchire et claque comme un fouet. Le commandant Laignel jambes écartées, porte-voix à la main, parfaitement calme, ordonne de larguer le petit hunier. Les gabiers hésitent à monter sur la vergue. Un élève de seconde classe, Monsieur Heuverard montre l’exemple et s’élance le premier. La voile est établie et bordée. Elle tient bon. La frégate abat enfin et vient vent arrière. Nous regagnons le large. Je voudrais me coucher mais le poste est bouleversé, inondé, mon hamac trempé. Je me rencogne entre deux couples, secoué de quintes de toux douloureuses. Je ne dormirai pas. »

Rue de siam nov 1944 2

L'exode

Le 29/03/2022

Le terrible exode des Ukrainiens me rappelle celui des Brestois en août 1944. Je ne sais qui a qualifié d’Exode ce déplacement de population, sans doute moins important que la sortie des Hébreux d’Égypte, mais le mot s’est imposé. J’avais un an et demi et on me l’a raconté souvent.

Les Américains approchent de Brest. Cernés, les Allemands se préparent à soutenir un siège. Ils font partir les populations civiles pour ne pas risquer qu’on leur tire dans le dos. L’ordre d’évacuation de Brest et des communes alentour est donné le 14 août. Tout le monde doit partir immédiatement. Certains prennent une petite valise, d’autres partent comme ils sont. Il fait un temps magnifique, on ne songe même pas à prendre des vêtements chauds, des couvertures. Pour les provisions la question ne se pose pas, il n’y en a plus. Gaby, la sœur de papa, fera tout l’exode avec un seul chemisier. Il faudra lui trouver quelque chose à mettre pour sauvegarder sa pudeur quand elle le lavera.

Le père Le Lann (mon grand-père) a mis la grand-mère impotente dans une brouette. Elle n’est pas bien lourde mais on a chargé sur elle toutes sortes de choses si bien que la brouette paraît de plomb. Les hommes se relaient, échangent leur brouette pour se défatiguer. Je suis tranquille dans mon landau. Calme et jovial malgré la chaleur. On a entassé sur moi tout ce qu’on pouvait sans m’étouffer. Les enfants s’amusent à pousser mon carrosse. Maman a du mal à suivre.

Des paysans de Kerhuon nous dépassent en charrette à cheval. Voyant la grand-mère dans sa brouette ils la prennent avec eux. On n’a pas eu de ses nouvelles pendant tout l’exode. Il n’était pas nécessaire de la chercher dans toutes les fermes de la région. Belle-mère du père Le Lann (la deuxième femme de son père), il ne l’aimait pas beaucoup. Elle finira par rentrer chez elle, on ne sait comment.

Les Allemands nous font traverser le pont de Plougastel (qu’ils dynamiteront le 25 août) puis remonter l’Elorn par la rive gauche. La côte est dure pour arriver à Dirinon mais un poste de secours de la Croix Rouge nous y attend. Des infirmières distribuent du lait pour les enfants, quelque nourriture pour les femmes et de l’eau à l’abreuvoir pour tout le monde. Les hommes, servis en dernier, n’ont ni vin ni pain. On fait étape.

Les paysans autorisent les réfugiés à dormir dans la paille, mais interdiction de fumer. Mon père préfère dormir dans la ferme sur un banc. Pour se mettre un peu à l’abri des moustiques, il a placé un demi oignon cru de chaque côté de sa tête. Il ne craint pas de tomber du banc dans son sommeil, car dessous dorment les sœurs Normand, toutes deux souples et grasses à souhait. Les fermiers ont tenu à installer maman dans un lit clos avec moi. Elle ne fermera pas l’œil de la nuit, disant au matin qu’elle a dormi sur des barres de fer ! On lui avait pourtant bien préparé son lit, avec des draps propres. Les draps des morts, lui disent les commères voisines, venues observer le lendemain les citadins en déroute.

Le père Le Lann a dormi dans la paille avec la plupart des hommes. Ils sont dévorés par les moustiques. Après une nuit agitée, le jour le réveille avec une impérieuse envie de fumer. Perdu dans le foin, il tâtonne autour de lui cherchant sa blague à tabac. Il trouve enfin quelque chose de mou et de froid. Qui se met à bouger, il a saisi un crapaud à pleine main. Chacun s’écarte de son côté, réveillé pour de bon. Pendant la nuit, des combats ont eu lieu près de Dirinon. Les FFI (Forces Françaises de l’Intérieur) ont attaqué les Allemands. Nous ne pouvons pas rester là.

L’errance reprend. Les réfugiés s’installent dans les fermes qui veulent bien les recevoir, à Plounéventer, à Plouédern... Mon père décide d’aller à Plouguerneau où il a sympathisé avec des paysans, à qui il achète du beurre. Encore trente kilomètres de marche. Maman n’en peut plus. « C’est après ce virage, en haut de cette côte, on est presque arrivé… » qu’on lui dit sans cesse. Enfin c’est vrai, les Morvan nous accueillent dans leur ferme. Morte de fatigue, morte de faim, maman se laisse tomber par terre. Papa fait à manger. En cas de guerre ou d’épidémie il sait faire la cuisine. Dans la grande marmite qui sert à cuire la nourriture pour les cochons, il met les pommes de terre et le lard. L’évocation de l'odeur puis du goût, faisaient encore saliver les anciens, 50 ans après.

A la ferme, je suis comme un roi. Je cours partout avec la fille de la maison qui a mon âge. Je patauge dans le purin avec mes petits souliers blancs, je n’en ai pas d’autres (maman m’habille comme un petit prince). Elle ne parle que le breton et moi le français, quelques mots chacun, c’est suffisant. Elle m’appelle : «  Deus’ta Gilbert ! » (Viens donc). J’accours pour jouer avec la terre. Cette petite sera l’aînée de dix-neuf frères et sœurs, des bébés que la mère rapporte parfois du champ dans son tablier. Ce qui prouve que les enfants naissent bien dans les choux, du moins à la ferme.

On n’était pas si mal à Plouguerneau mais Gaby, et Jo son mari, se faisaient du souci pour leur maison. Papa décide donc d’aller voir à Kerhuon s’il y a eu des dégâts. Il en profitera pour ramener son vélo. Vers Guipavas des combats violents ont eu lieu. François passe par les champs pour ne pas être arrêté par les Américains. Dans un talus des Allemands avaient creusé des trous individuels. Ils y sont encore, tous morts, portant des blessures dans le dos. Ils n’avaient pas choisi le bon côté. Papa avise une paire de bottes qui ont l’air neuves. Il les rejette horrifié, les pieds sont encore dedans. Il raconte :

« J’arrive à la maison, tout paraît normal. Je passe par-dessus le mur car je sais que les Allemands aiment bien piéger les portes. J’entre, tout est ouvert, sens dessus dessous. La saleté partout. Tous les lits ont été descendus dans la cave, sur l’un d’eux trône un tas de merde. De gros réveils sont posés dans tous les coins. Des photos traînent, je reconnais deux filles du bourg. J’apprendrai plus tard que celles-là sauveront leurs cheveux et leur peau car elles auront la chance d’être arrêtées. De toute évidence la maison a servi de bordel aux parachutistes allemands.

Tout ce qui avait une valeur quelconque, négociable immédiatement a été volé. Ils ont même volé ma croix de guerre avec étoile d’argent (reçue à Mers el-Kébir sur le cuirassé Dunkerque), heureusement je retrouve mon vélo. J’avais pris la précaution de cacher les roues dans le faux plafond de la cave. Le cadre seul n’était pas vendable en ces temps d’urgences.

Quelques jours après, je reviens avec Jo pour une exploration plus approfondie. Le jardin a été déminé. Je trouve dans le four de la cuisinière un énorme plat de poires cuites dans une épaisse couche de sucre caramélisé. Pour les poires, il suffit de se servir dans le jardin où les poiriers admirablement tenus par Jo, croulent sous les fruits. Mais pour le sucre en poudre, je n’en ai pas vu une telle quantité depuis longtemps. Jo ne veut pas en manger, elles sont peut-être empoisonnées. Elles ne l’étaient pas car j’en serais sûrement mort ! Jo a soudain une idée. Gaby a caché une bouteille de Byrrh dans la cheminée. On cherche, la bouteille y est toujours. A la guerre comme à la guerre, il a fallu la boire en entier, il aurait été peu vraisemblable que les voleurs en aient laissé. »

Le dix-huit septembre 1944 Brest est libéré. Nous rentrons à la maison. Ce n’est pas le cas pour tout le monde. Brest n’est plus qu’un monceau de ruines.

Christophe paulin de la poix de freminville

Le chevalier de Fréminville

Le 25/06/2020

"Les aventures du chevalier de Fréminville, marin, savant et travesti"

éditions Coop Breizh         

 

         Le Chevalier Christophe-Paulin de la Poix de Fréminville nait à Ivry sur Seine en 1787 dans une grande famille d’écrivains, juristes, ingénieurs et marins. Il est fait Chevalier de Malte dès son enfance. Engagé dans la marine à 14 ans, il poursuit une carrière d’officier de marine jusqu’au grade de Capitaine de frégate et participe à plusieurs combats navals. Amoureux de la Bretagne, il réside à Brest entre deux campagnes et y prend sa retraite. Il décède de maladie dans cette ville en 1848.

         Fréminville est un original, royaliste et légitimiste (au point de démissionner de la marine à l’avènement de Louis-Philippe). Dès l’adolescence il s’intéresse à la nature, il suit les cours de Lamarck et Brongniart au Muséum d’histoire naturelle. Il manque de mourir de la fièvre jaune à Saint-Domingue, navigue en Mer glaciale, en mer Baltique, aux Caraïbes…

         C’est là qu’il rencontre Caroline et vit une tragique histoire d’amour (elle se suicidera pour lui) qui sans doute influencera son comportement ultérieur. À son retour en France il paraîtra en public habillé en femme.

        Écrivain prolixe et érudit, il fait l’éloge du costume féminin et produit de nombreux ouvrages sur la navigation, l’histoire du moyen âge et les ‟antiquités” de Bretagne. Fréminville est encore cités aujourd’hui pour ses observations archéologiques.

        Celtomane, romantique, naturaliste, ‟antiquaire”, franc-maçon, marin et chouan à l’occasion, il laisse dans la mémoire des Brestois l’image d’un travesti savant, et d’un Templier d’un autre âge.

         Le livre est rédigé à la première personne. Il nous fait revivre l’époque napoléonienne et la Restauration où dominaient la celtomanie et le romantisme, sans chercher à imiter les excès de l’époque en matière de langage et de sentiments. Les rapports complexes de Fréminville avec les femmes (il a été marié et a eu deux enfants) sous-tendent l’ouvrage mais sa vraie passion est l’Histoire héroïque. Nous parcourons les mers avec lui et vivons à Brest au début du 19ème siècle. L’ouvrage est fondé sur une documentation originale et souvent peu connue.         

Printemps des sonneurs

Printemps des sonneurs

Le 30/04/2019

         « Le Printemps des sonneurs a fait vibrer le centre-ville de Brest, ce samedi [24 avril 2019] entre bourrasques et rayons de soleil… » dixit Le Télégramme. Nous avons un peu hésité avant d’aller voir le défilé des bagadoù. Le vent, le froid, la pluie peut-être. Mais sans particules fines.

         Sur le cours Dajot la foule n’est pas considérable. On entend la musique au loin, la première kevrenn approche. Les spectateurs s’écartent quand les géants de la sécurité vêtus de noir s’avancent, imperturbables. Et c’est le choc. Un roulement de tambour, le bref soupir des sacs qu’on glisse sous le bras gauche et la musique éclate. Peut-être faut-il être Breton pour sentir cette émotion qui vous saisit quand s’élève la mélopée des ancêtres. Ses vibrations puissantes montent de la terre, traversent le corps et vous piquent les yeux. Les pieds se mettent en mouvement et on voudrait marcher au son des tambours. Avec le remord d’un nationalisme incongru.

         On ne peut s’empêcher de penser à la guerre. Aux luttes incessantes du peuple breton pour son indépendance et pour ne pas payer de tribut à quiconque. Arthur battu à Camlann, Morvan vaincu par Louis le Pieux, Nominoë enfin vainqueur de Charles le Chauve à Ballon, Jean de Rieux écrasé à Saint-Aubin-du-Cormier par les troupes de Charles VIII, les gars de Plouyé massacrés au Prat-ar-mil-Gof (pré des mille ventres)… et tout ce sang répandu depuis des siècles par les paysans bretons.

        Je ne suis pas le seul à être envahi par ces idées belliqueuses. Une petite fille, trois, quatre ans tout au plus, fluette et blonde, se place résolument au milieu de l’allée. Raide comme la justice, au garde-à-vous, elle fait le salut militaire devant une kevrenn qui s’avance. Le geste me paraît parfaitement règlementaire, main au niveau de l’oreille, doigts joints, bras horizontal. Sa grande sœur l’attrape par la manche pour la ramener sur le bord de la rue mais elle s’échappe et retourne au beau milieu pour saluer à nouveau. Elle s’écarte enfin à regret. À quoi pense donc cette enfant ?

          Salue-t-elle le drapeau breton ? Il n’y en a pas de visible. Songe-t-elle aux Highlanders qui montaient à l’assaut au son des cornemuses en quatorze ? Ce n’est pas au programme de maternelle. Il faut être honnête, je pense tout simplement qu’elle croit que nos sonneurs jouent de la musique militaire. Papa est officier de marine sans doute. Elle a vu son père défiler en musique et les officiels saluer le drapeau. Elle fait de même. Et avec quelle autorité !  

          L’émotion ne dure pas longtemps. La musique est répétitive pour les non-spécialistes. Les groupes qui descendent le cours Dajot, croisent dans une cacophonie échevelée ceux qui remontent par la contre-allée.

          Défilé final pour le triomphe. Nous marchons au pas avec les sonneurs vers la mairie. Ils se rassemblent sur les escaliers, sous la riante façade du Ti Kêr (on ne s’étonnerait pas de voir Staline apparaître au balcon pour saluer la foule). Dernier frisson, les 300 musiciens jouent à l’unisson ‟Deut mat Lan” (Tient bon Lan). Quelques gouttes tombent du ciel, trois coups de goupillon pour achever la journée. Il est temps de rentrer.

Malmanche2

Brest, meurtre du Lieutenant Patrys

Le 02/04/2019

           Juin 1791. Le désordre est total à Brest. On ne sait plus qui commande. Les marins et les soldats se mutinent, ils ne veulent plus obéir à des officiers nobles (la moitié des officiers ont déjà quitté ou ne réintègrent pas le service après des congés). Les chefs militaires de la place de Brest démissionnent les uns après les autres, considérant leur tâche impossible. Les ouvriers de l’arsenal se mettent en grève et manifestent avec violence dans les rues. Ils ne sont pas payés régulièrement et refusent les assignats (il faudra qu’ils s’y fassent). Les ecclésiastiques réfractaires sont emprisonnés au Château, tandis que les prêtres constitutionnels sont insultés et caillassés par les femmes dans la rue. La Société des amis de la constitution s’immisce dans toutes les affaires, y compris militaires et s’oppose à la municipalité trop timorée à son avis. La chiourme s’agite, la Garde nationale est obligée d’intervenir au bagne. Les sans-culottes brestois maintiennent une agitation permanente et s’opposent aux patriotes modérés, bourgeois, commerçants et artisans. L’excitation est à son comble quand on apprend la fuite du Roi.

          Les officiers de l’armée de terre ont l’habitude de se réunir au café de la Comédie, situé à l’angle de la rue Saint-Yves et de la rue d’Aiguillon. Des sans-culottes aperçoivent sur une table des graffitis anti révolutionnaires. Ils demandent : « Qui a fait ça ? » Un jeune officier du régiment du Poitou nommé Patrys se lève et dit fièrement : « C’est moi ! » Il s’en suit une bagarre, les uns courent dehors en criant au contre-révolutionnaire pour ameuter les sans-culottes, les autres se saisissent de Patrys, le traîne hors du café et avec un couteau de cuisine, lui détachent la tête du corps. Ses camarades retranchés dans le fond de la salle ont dégainé leur épée et tiennent les sans-culottes en respect.

           Le maire, Charles François Malmanche prévenu, arrive rapidement accompagné des administrateurs du district. Mais c’est trop tard pour Patrys. Aidé par un groupe de patriotes de bonne volonté, Malmanche réussit à extraire du café les autres officiers et à les mettre en sureté. Plantée sur une pique, la tête du jeune lieutenant est promenée par les rues de Brest et son corps jeté dans le ravin du Pont de terre. Première victime de la Révolution à Brest. Il y en aura beaucoup d’autres, dont Malmanche lui-même.