<!-- Google tag (gtag.js) --> <script async src="https://www.googletagmanager.com/gtag/js?id=G-RV5MDRFCJP"></script> <script> window.dataLayer = window.dataLayer || []; function gtag(){dataLayer.push(arguments);} gtag('js', new Date()); gtag('config', 'G-RV5MDRFCJP'); </script>

 

esprit des lois

Capture d ecran 586

Le fonctionnaire zélé

Le 29/09/2025

Le fonctionnaire zélé

C’est la rentrée avec ses joies (les copains) et ses déceptions (un sac à dos neuf ne compense pas le dur apprentissage des tables de multiplication). Une jeune femme séparée de son mari, en instance de divorce, s’est vu refuser l’entrée à l’école de son fils de quatre ans. Il manque la signature du père. Celui-ci injoignable, probablement à l’étranger, ne donne plus signe de vie. Comment l’administration peut-elle bafouer un principe de base de la République qui déclare l’éducation obligatoire pour tous les enfants de plus de trois ans. On admet bien les sans-papiers à l’école pourquoi pas ce gamin ? Le problème a été réglé dès le lendemain mais pourquoi avoir infligé une pareille humiliation à cette maman ?

Sans doute une circulaire ou un autre règlement prévoit le rejet des enfants de parents séparés s’il n’y a pas l’accord des deux parents, au mépris de la loi fondamentale (le préambule de la Constitution garantit l’accès de l’enfant à l’instruction). Un fonctionnaire a appliqué une mesure anticonstitutionnelle sans vergogne. Il ne pouvait pas faire autrement dira-t-il.

Voilà le problème de l’administration, elle ne peut pas faire autrement. Le règlement c’est le règlement ! J’ai connu un grand chef qui disait souvent : « Le règlement doit être assez solide pour qu’on puisse s’assoir dessus. » Exemple : Une décision du Service des pensions privait une veuve de tout revenu, en vertu d’un article nébuleux du code d’icelles. Il a fallu tordre le bras du chef de ce service pour lui faire annuler sa décision : une commission présidée par un haut fonctionnaire, a adopté une fausse déclaration qui a tout résolu. Le règlement a été respecté (les fausses déclarations des hautes autorités ne sont pas prévues).

Le problème avec la règlementation (élaborée par les fonctionnaires eux-mêmes) c’est qu’elle est conçue pour éviter la fraude, la concussion, la corruption, la forfaiture, etc. Elle en fait tellement parfois, que les objectifs sont perdus de vue, à savoir préserver les intérêts de l’État et des citoyens. Ainsi le code des marchés publics est devenu si complexe qu’il permettrait d’inculper n’importe quel donneur d’ordre pour favoritisme ou autre, tant il est impossible de le respecter à la lettre (ou à l’inverse, de relaxer un fraudeur comme Henri Proglio dans l’affaire des consultants d’EDF). L’administration ne fait confiance à personne (c’est peut-être en train de changer un peu avec le droit à l’erreur) et ça coûte très cher.

Le fonctionnaire zélé, parfait connaisseur de la réglementation, est capable de dénicher l’article incongru qui va mettre en défaut le plus honnête des citoyens ou le plus vertueux des projets. Il est comme l’escargot de Quimper, titulaire d’un pouvoir de nuisances démocratiques sans commune mesure avec son importance hiérarchique.    

Le fonctionnaire zélé est une plaie coûteuse, surtout s’il travaille à Paris (ou dans un service déconcentré). Il peut en faire travailler des milliers d’autres, pour seulement un camembert ou un histogramme déposé sur le bureau d’un ministre, qui s’en félicitera avant de passer à autre chose. Le souci du détail est ruineux et plus une statistique est précise, plus elle est fausse. Si la normalisation n’est pas toujours nécessaire elle est toujours coûteuse, en temps de travail des fonctionnaires (inflation des effectifs), en application et en contrôle. Les citoyens en supportent le poids, le coût de la complexité et finalement les impôts.

Il n’y a pas de remède au fonctionnaire zélé. En réalité ce qu’il faudrait changer c’est l’esprit des lois (et de la réglementation) mais Montesquieu est mort. Et l’Europe ne nous aidera pas.