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latin en médecine

Tribunal de l impuissance

Au doigt et à l'œil

Le 02/05/2020

        Avant 1677, année où le Parlement de Paris interdit les congrès, ceux-ci consistaient en joutes publiques où un mari soupçonné d’impuissance, devait prouver devant témoins, médecins et matrones, que l’accusation était calomnieuse. Le malheureux qui se gavait de nourritures poivrées et pimentées, censées doper sa virilité, devait s’exécuter sans faillir, sous peine de voir son mariage annulé. Le résultat de la copulation était vérifié au doigt et à l’œil, selon la formule juridique en vigueur.

        Visitée aussi au doigt et à l’œil par les matrones, la victime d’un viol pour vérifier si les organes de la plaignante ont gardés leur apparence naturelle. Comme dans toutes les techniques de haute volée, un vocabulaire spécifique était employé pour désigner les parties examinées (et égarer les oreilles indiscrètes) :

         Les barres, l’os pubien ; le lippion, le poil ; l’entrepet, le périnée ; les balunaus, les grandes lèvres ; le lipppendis, le bord des lèvres ; les baboles, les nynphes ; les halerons, les caroncules ; le barbidan, le clitoris ; le guilboquet, le vagin ; la dame du milieu, l’hymen ; l’arrière fosse : l’orifice interne de la matrice.

         Comment une expression juridique, employée au sens propre d’examen par la vue et le toucher, est-elle devenue une injonction d’obéir sans discuter, au doigt et à l’œil ? Souvent, les sources divergent sur l’origine d’une expression ancienne. Depuis l’œil du tailleur qui était le coffre où il rangeait ses chutes de tissus (d’où peut-être, l’expression obtenir quelque chose à l’œil, c’est-à-dire gratuitement), jusqu’à l’obéissance des animaux de cirque ou domestiques, qui obéissent sans qu’on ait à leur parler, simplement sur un signe ou un regard, il n’y a rien de convaincant. Reste l’explication la plus simple. Examiner quelqu’un au doigt et à l’œil dans ses parties intimes, ne devait pas se faire sans quelques réticences. D’où le glissement du sens de l’expression, du sens propre au sens figuré, d’obéissance sans récrimination ni résistance. 

         Autrefois, les médecins utilisaient le latin pour exprimer leur ignorance et la dissimuler au malade (aujourd’hui, c’est en nous aveuglant de leurs lumières). Des mots scabreux qui pouvaient choquer les patients, exprimés en latin, ont survécu jusqu’aujourd’hui : pénis, phallus, utérus, hymen… Enfin, sans être malade, on pouvait utiliser un gaude-michi (réjouis moi en latin), devenu le moderne godemichet.